Des conférences qui font réfléchir et rire, des ateliers pratiques qui aiguisent les connaissances et des moments d’échange qui consolident la cohésion : la rencontre annuelle du réseau des TIR-SHV a réuni près de 70 personnes autour des thèmes de la connexion, de la mobilisation et de la formation. Survol d’un événement riche et unique.
La première conférence portait sur l’intelligence émotionnelle. Marili B. Deroschers, fondatrice de l’entreprise Coefficient RH, a présenté avec humour et conviction cet outil stratégique qui permet de collaborer de façon efficace avec des partenaires.
Par exemple :
- Si vous êtes directe et que vous aimez prendre des décisions rapidement, comment interagissez-vous avec quelqu’un qui a besoin de temps pour y penser ?
- Si vous carburez au changement, comment échangez-vous avec un partenaire qui fonctionne bien dans un environnement stable ?
- Pour vous, suivre les règles et les procédures est essentiel. Comment vous sentez-vous lorsque quelqu’un propose de faire les choses autrement ?
Ces situations, qui font partie de votre quotidien, montrent à quel point il est important se « lire » et bien « lire » les autres pour bien travailler ensemble.
Marili B. Deroschers a présenté de façon humoristique comment, lorsqu’on prend le temps de s’observer en temps réel, une dynamique potentiellement tendue peut se transformer en un échange fructueux. Ce fut un moment de complicité : chacun se reconnaissait ou reconnaissait un partenaire.
Par exemple, si Julie a une idée géniale qu’elle veut absolument partager avec Benoit et qu’elle lui « garroche » à froid, elle va se heurter au côté analytique de Benoit, et recevoir ses questions comme autant d’éteignoirs : Es-tu sûre ? As-tu pensé à ça ? Est-ce que ça se fait ailleurs ? Si Julie lui dit plutôt « j’ai une idée et besoin d’en parler : dis-moi tout ce qui te passe par la tête », une synergie va s’installer.
L’approche présentée par Marili B. Deroschers repose sur l’outil Talent Insights®, qui fait le portrait des individus en fonction de quatre critères, illustrés par quatre couleurs :
- Le dominant (rouge) est axé sur les décisions: il ou elle recherche des résultats, commande, égratigne, conteste et aime débattre.
- L’influenceur (jaune) est axé sur l’interaction: il ou elle cherche une expérience, est optimiste, parle beaucoup, exprime ses émotions.
- Le stable (vert) est axé sur le rythme: il ou elle recherche la sécurité, communique de façon calme et méthodique et préfère écouter que parler.
- Le consciencieux (bleu) est axé sur les règles et les procédures. Il ou elle recherche de l’information, observe, questionne, doute et veut des faits.
La contribution de Marili B. Deroschers à cette rencontre annuelle comprenait un bonus : toutes les personnes ayant rempli le questionnaire Talent Insights® ont reçu un document personnalisé étoffé contenant une mine d’informations précises et nuancées sur leur profil, ainsi que des graphiques très parlants.
Susciter l’engagement pour que chacun se sente sur son X
Tout comme Marili B. Desrochers, Véronique Buisson est une adepte de la lecture sans jugement de nos comportements et de ceux des autres. La conférencière, qui est une coach spécialiste de la communication, a abordé la collaboration sous l’angle de trois leviers qui suscitent et soutiennent l’engagement des partenaires.
Le levier de l’autonomie est associé au sentiment de diriger : il s’agit de favoriser la cocréation en accordant de la valeur et de l’importance aux idées des autres.
Le levier de la maîtrise est associé au sentiment de compétence : il s’agit de donner l’occasion aux partenaires de s’accomplir en sollicitant leurs qualités et leurs connaissances. Cette attitude peut même les inciter à se surpasser.
Le levier de la pertinence est associé au sentiment de sens. C’est la participation à quelque chose de plus grand que soi qui motive les partenaires.
Il ne s’agit pas de dire à nos partenaires quoi faire, mais plutôt de les outiller et de les accompagner pour qu’ils se sentent sur leur X. Pour y arriver, Véronique a souligné l’importance de réaliser qu’il existe plusieurs réalités et perceptions, qui sont aussi légitimes les unes que les autres.
Les ateliers : stratégies gagnantes au menu
L’atelier « Habiletés politiques et communication » animé par Alain Madgin et Valérie Chamula, de l’agence de relations publiques Citoyen, a mis de l’avant plusieurs stratégies pour bien positionner les TIR dans l’espace public.
Montez une cartographie qui répertorie l’ensemble des acteurs et des médias influents. Établissez une liste et faites un suivi minutieux de vos contacts avec eux, afin de bien choisir les moments où vous leur présenterez la valeur ajoutée des TIR.
Une fois ces parties prenantes et influenceurs bien identifiés, travaillez ce qu’on appelle un pitch d’ascenseur qui vous servira lorsque vous croiserez l’un d’entre eux à un événement : vous aurez alors une minute pour obtenir un rendez-vous avec elle ou lui !
Du côté des médias sociaux, désormais incontournables, les animateurs ont donné deux conseils : suivez les fils twitter des acteurs avec qui vous souhaitez entrer en contact, afin de bien suivre leurs priorités du moment. Et, si ce n’est déjà fait, créez une page Facebook et prenez soin d’y publier des photos en identifiant les acteurs, ce qui va les inciter à partager l’information dans leur réseau. Publiez de façon régulière des contenus variés comme le suivi d’un projet en cours, mais aussi le lien vers une entrevue ou un article dans lequel le travail de la TIR est mis en valeur.
Au cours de l’atelier sur l’évaluation, animé par Sonia Racine, de l’organisme Communagir, les participants ont eu l’occasion de déterminer les rôles les plus contributifs de la mission des TIR-SHV et la façon dont ils se concrétisent. L’animatrice a montré qu’à partir d’une vision globale de l’écosystème (environnement), il est possible d’augmenter l’impact de la TIR pour arriver à des changements durables en travaillant sur les points suivants :
- le réseautage ;
- la structuration et l’alignement de l’action
- la réalisation d’actions collectives ;
- le renforcement de la capacité des parties prenantes de la TIR.
Chantal de Montigny de Vivre en ville et Elyse Martineau du Carrefour bioalimentaire Laurentides, ont partagé leur expertise sur une problématique qui touche plusieurs régions : comment optimiser le transport des aliments, quand les besoins sont dispersés sur un grand territoire ? L’approche intersectorielle d’envergure coordonnée par le Carrefour bioalimentaire est un exemple inspirant de réflexion collective. Cette démarche structurée, à laquelle toutes les parties prenantes ont participé, a mené à l’élaboration d’une Stratégie bioalimentaire des Laurentides 2018-2023. Cette vision régionale s’appuie sur l’implantation d’un système alimentaire de proximité qui favorise l’accessibilité géographique et financière à des aliments sains, produits de façon durable. Six chantiers collectifs sont en cours, dont l’accès aux terres, le transport durable favorisant l’accès aux aliments pour les personnes vulnérables et la valorisation des métiers du secteur agroalimentaire.
Des moments de détente et de socialisation
Les organisateurs de la rencontre avaient bien dosé le programme. Plusieurs longues pauses ont favorisé le réseautage, une marche à la lampe frontale a réuni un groupe qui a bien profité de ce moment actif en plein air et les participants ont dégusté les spécialités locales apportées par les unes et les autres tout en discutant.
Les forums ouverts : des échanges animés et fructueux
Jeudi matin, les forums ouverts simultanés ont porté sur cinq thèmes :
- Les communautés autochtones
- Prendre soin de notre monde
- La fonction de coordination
- Mode de vie physiquement actif
- Développement social
- Accès à une saine alimentation
Pendant 90 minutes, la salle s’est mise à bourdonner de questions, d’idées et de partages d’expériences. Cette occasion d’échanger sur les réalisations et des défis de la dernière année était visiblement attendue par tous et toutes. Cette contribution enthousiaste, soutenue par la présence d’animateurs à l’écoute a engendré des conversations dynamiques où la passion des participants était palpable.
Animé par Denis Marion, le forum sur l’approche Prendre soin de notre monde a suscité de nombreux échanges. Les participants ont réaffirmé leur intérêt et leur engagement envers cette démarche, tout en soulignant l’importance d’une communication plus soutenue entre les régions, afin de partager les projets, les enjeux et les bons coups de chacun.
La contamination sociale pour accélérer le changement
La rencontre s’est terminée sur une conférence de Marie-Ève Landry. La psychologue organisationnelle a eu l’audace d’amorcer sa présentation en parlant de l’épidémie de syphilis qui a frappé la ville de Baltimore en 1990. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’un modèle parfait de contamination dont les TIR peuvent s’inspirer. L’assistance était visiblement dubitative, mais Marie-Ève Landry a bien expliqué l’analogie entre la contamination virale et la contamination sociale :
- Le contexte favorable à la contagion est lié à l’arrivée du crack dans cette ville.
- Le message a « collé », parce que le virus a muté, le rendant résistant au traitement.
- La circulation du message s’est accélérée, parce que les porteurs du virus, déplacés pour cause de fermeture de HLM dans leurs quartiers, ont contaminé d’autres personnes.
La conférencière a également dressé un portrait des différents talents susceptibles de contaminer une communauté :
- Les dynamiques ont de l’énergie à revendre : ils ont la capacité de convaincre les visionnaires et les gens qui carburent au changement.
- Les penseurs, qui prennent des décisions sages, ont les bons arguments pour convaincre les personnes pragmatiques.
- Les persuasifs ont la persévérance nécessaire pour inciter les personnes conservatrices à adopter de nouvelles habitudes.
- Les réseauteurs, qui connaissent tout le monde, agissent à toutes les étapes et tous les niveaux de la contamination.
Les participants ont quitté le Baluchon avec des idées plein la tête, des outils à expérimenter, de nouvelles stratégies de communication à mettre en pratique, et une perception enrichie de leurs façons d’être et de travailler. Ces événements annuels sont une belle occasion de se ressourcer et de prendre la mesure de la pertinence du travail des TIR et de la force d’un réseau engagé.
Photos : Étienne Boisvert