Pour stimuler l’économie en temps de pandémie, le gouvernement du Québec a annoncé des investissements massifs dans les infrastructures. L’occasion est belle pour les municipalités de réaménager leur territoire en vue d’améliorer la qualité de vie et la santé des citoyens. En somme, de s’assurer que la relance soit aussi sociale et environnementale. Jeanne Robin, directrice principale de Vivre en ville, nous livre trois pistes de réflexion pour y arriver.
Avec le projet de loi 66 visant à accélérer la réalisation de projets d’infrastructures, les collectivités québécoises sont à la croisée des chemins. Car s’il y a une chose qui marque le territoire pour des décennies, ce sont les infrastructures. Aussi bien se poser les bonnes questions avant de prendre des décisions : les routes, les écoles, les maisons des aînés, les hôpitaux, tous ces équipements vont-ils aggraver la congestion routière ou au contraire renforcer l’animation dans le secteur ? Vont-ils engendrer des problèmes de bruit et de qualité de l’air ou favoriser une meilleure adaptation aux changements climatiques ?
« L’argent investi doit contribuer à la lutte aux changements climatiques, à la réduction des inégalités sociales et au développement de collectivités prospères et résilientes, affirme Jeanne Robin. Parce que si l’argent de la relance crée des problèmes pour les générations futures, on n’est pas sortis du bois ! Les municipalités doivent adopter une vision à long terme en aménagement du territoire afin d’améliorer la qualité de vie et la santé de leur population. »
- Proximité
Le concept de ville des 15 minutes fait de plus en plus d’émules ici et ailleurs. Le but : créer des quartiers denses et mixtes, où les résidents peuvent non seulement vivre, mais aussi travailler et faire leurs achats. « Prenons les écoles. Le projet de loi 66 prévoit d’en construire une trentaine. Où seront-elles érigées ? Les enfants pourront-ils s’y rendre à pied ou à vélo ? Même chose pour la cinquantaine de maisons des aînés à sortir de terre. Les équipements doivent être accessibles, insiste Jeanne Robin. Pour cela, il faut trouver la meilleure localisation. Les municipalités doivent déterminer les critères d’implantation. Autrement, on risque de prendre des décisions qu’on va regretter. Le lien entre la santé, la qualité de vie et l’aménagement des milieux de vie n’est plus à faire. »
- Adaptation aux changements climatiques
Une meilleure adaptation aux changements climatiques passe essentiellement par la gestion de l’eau, le verdissement et la protection des milieux naturels. « Les milieux naturels sont des éponges contre les éventuels risques d’inondation. Ce sont des poumons verts et des îlots de fraîcheur, avance Jeanne Robin. Il est prouvé que plus on s’étale sur le territoire, plus les vagues de chaleur ont tendance à être fréquentes et longues. Quand on détruit un boisé en périphérie d’une région urbaine, on aggrave la problématique des îlots de chaleur partout dans la région. »
- Consolider les milieux de vie existants
L’argent investi devrait servir enfin à consolider les milieux de vie existants plutôt que de développer de nouveaux territoires inutilement. « Par exemple, si une industrie fermée a laissé un terrain vacant, ça peut être une bonne idée de le réutiliser pour y implanter des équipements et des activités, observe Jeanne Robin. Ces terrains existants ont l’avantage d’être déjà viabilisés avec l’ensemble des services urbains – infrastructures pour l’eau potable, les égouts, les routes. À moyen terme, cela représente des économies pour la collectivité ainsi qu’une amélioration de la qualité de vie. Car ces noyaux villageois ou ces districts commerciaux dévitalisés demeurent des milieux habités. Ramener de l’animation permet de mieux servir les gens. »
Les acteurs de soutien à la rescousse
Les acteurs de soutien ont une connaissance du milieu et des bonnes pratiques. Ils font un travail de veille, de transmission et d’information. Leur apport sera d’autant plus important dans les travaux d’aménagement à venir. « Dans un monde idéal, tout le monde serait au courant de ce qui se fait ici et ailleurs pour être en mesure d’adapter les meilleures pratiques en fonction des besoins. Or souvent, les acteurs locaux n’ont pas le temps de s’informer, remarque Jeanne Robin. À Vivre en ville, on documente les cas et on les soumet aux collectivités pour qu’elles s’en inspirent. » Un soutien utile et pertinent qui profite à toutes les municipalités.